Afghanistan : Complément de littérature
Suite à quelques découvertes, prolongeons le voyage en Afghanistan.
6/22/2025


Miniature représentant Babur, fondateur de l'Empire Moghol
Une lecture en entraînant d'autres...
Au moment où j'écris ces lignes, je viens de terminer la lecture de Si l'Afghanistan m'était conté de Alain Coppolani. Je ne détaillerai jamais assez tout le bien que je pense de ce livre, qui m'amène à compléter la feuille de route initiale. Il se divise en sept parties :
Histoire
Territoire et société (dans laquelle mes amis juristes trouveront des développements particulièrement intéressants sur le droit afghan, le droit coutumier Pachtoune et le droit islamique)
Système politique depuis 1919
Religion
L'Afghanistan contemporain sur la scène internationale
Economie
Culture
Cet ouvrage est foisonnant d'informations et de détails, quasiment tous les aspects de la vie en Afghanistan sont expliqués et rapportés, tant du point de vue de la vie politique que de la vie quotidienne. On ne peut pas rêver mieux pour découvrir un pays, j'espère trouver d'autres livres comme cela pour les prochaines destinations. Je ne peux qu'en recommander très chaudement la lecture.
J'ai beaucoup apprécié la finesse de l'analyse de l'enchevêtrement des différents systèmes de valeurs présent en Afghanistan, notamment la rencontre en l'Islam sunnite ou chiite, les coutumes des différentes ethnies et le pouvoir politique. L'explicitation des références historiques et leur impact sur la culture populaire est également très appréciable, à titre d'exemple, on peut parler de Malalaï de Maïwand (Si l'Afghanistan m'était conté, p.33).
Malalaï était une jeune fille Pachtoune, qui est entrée dans la légende suite à son héroïsme durant la seconde guerre anglo-afghane. Lors de la bataille de Maïwand, les Afghans perdaient du terrain face à l'artillerie, et commençaient à abandonner la bataille. C'est alors que Malalaï s'empara d'un drapeau et courut sur la champ de bataille en criant en pachto "Si vous ne tombez à la bataille de Maïwand, par Dieu, on se souviendra de vous comme symbole de la honte ! "
Bien entendu, ainsi galvanisés, les combattants afghans reprirent pieds et remportèrent la bataille, Malalaï y laissant sa vie.
Depuis, Malalaï est entrée dans l'histoire comme symbole de courage, et ce prénom est très répandu en Afghanistan et dans les régions pachtophones.
Au vu de l'exhaustivité de l'ouvrage, bien sûr qu'Alain Coppolani aborde la littérature en Afghanistan. La poésie y est une tradition plus que millénaire, mais malheureusement assez peu traduite en français pour ce qui est des œuvres les plus anciennes. Néanmoins, la littérature contemporaine est un peu plus accessible. Un nom en particulier a retenu mon attention : Sayd Bahodine Majrouh. Bien que pachtoune, Sayd Bahodine Majrouh écrit en dari. C'était un poète, philosophe, et folkloriste, engagé politiquement notamment dans la conservation de la culture afghane, assassiné pour des motifs politiques en 1988 (la lecture de Si l'Afghanistan m'était conté permet de saisir les enjeux politiques derrière cet assassinat).
Son œuvre majeure, Ego-Monstre paru en 1973 mais retravaillé jusqu'à sa mort en 1988, dénonce généralement la tyrannie, ce qui lui a valu l'inimité à la fois de l'envahisseur soviétique (début de la guerre en 1979), du gouvernement communiste allié aux soviétiques et des résistants à l'invasion. Cette opposition lui coûtera la vie en 1988. Cette œuvre doit être lue.
Deux autres de ses écrits m'attirent également :
Le suicide et le chant, dédié à la poésie populaire des femmes pachtounes. Un tel patrimoine littéraire ne doit pas rester méconnu. Je suis content d'avoir pu trouver ce livre, sachant que j'étais assez défaitiste initialement.
Rire avec Dieu, Aphorismes et contes soufis, pour découvrir un peu plus directement le soufisme (branche ésotérique de l'Islam)
Homeira Qaderi a également retenu mon attention. Docteure en littérature persane ayant réussi à éviter les restrictions à l'éducation imposées par les Talibans et récipiendaire de la médaille Malalaï, haute distinction civile récompensant son courage et son implication dans la défense du droit des femmes afghanes, une de ses œuvres est accessible en français : Danser dans la mosquée, publiée en 2020.